15/02/2023

Lecture : 5 min

Actualités | Veille légale RH Février 2023

Respect du repos quotidien en télétravail pour l'employeur

Tout salarié bénéficie d’un repos quotidien d’une durée minimale de onze heures consécutives (C. trav., art. L. 3131-1). La preuve du respect de ce droit au repos incombe exclusivement à l’employeur et le salarié n’a pas à apporter des éléments laissant supposer une violation de ce droit (Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-13.015).

 

La Cour de cassation fait de nouveau application de cette règle, à laquelle il ne peut être dérogé lorsque le salarié exerçait pour partie son activité en télétravail et conservait une liberté d’organisation dans son emploi du temps en fonction de ses déplacements. Même dans ces circonstances, l’employeur doit s’assurer (et le prouver en cas de contestation) que le salarié bénéficie effectivement de son repos quotidien.

 

Source :

(Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-13.015)

Cass. soc., 14 déc. 2022 n° 21-18.139 

 

Rupture anticipée du CDD de remplacement

Un employeur ne peut pas rompre le contrat de travail à durée déterminée (CDD) conclu pour remplacer un salarié absent, et ayant pour terme la fin de l'absence du salarié, alors que ce dernier n’a pas repris son poste, même si la durée minimale prévue au contrat est terminée.

 

C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt du 30 novembre 2022.

 

La Haute Cour confirme ainsi une jurisprudence ancienne, mais rarement reprise (Cour de cassation, chambre sociale, 15 octobre 2014, n° 13-18.582). Cet arrêt de 2014 a été rendu au sujet d’un contrat saisonnier, mais la solution s’applique au contrat de remplacement, comme le confirme notre arrêt de 2022.

 

En l’espèce, une entreprise avait recruté un salarié sous CDD pour remplacer l’un de ses salariés, parti en congé de formation de plusieurs mois.  Le contrat prévoyait que le salarié était embauché à compter du 22 février 2016 pour une durée minimale expirant le 15 novembre 2016, afin d'assurer le remplacement temporaire de M. E, absent pour congé individuel de formation et que si l'absence de ce dernier se prolongeait au-delà de la durée minimale prévue par l'engagement, celui-ci se poursuivrait jusqu'à la date du retour de l'intéressé qui constituerait le terme automatique de cet engagement. 

 

Cette rédaction est conforme à la législation. En effet, aux termes de l’article L 1242-7 du Code du travail, le contrat de travail à durée déterminée comporte un terme fixé avec précision dès sa conclusion. Il peut, toutefois, ne pas comporter de terme précis lorsqu'il est conclu dans un cas de remplacement d'un salarié absent. Le contrat de travail à durée déterminée est alors conclu pour une durée minimale. Il a pour terme la fin de l'absence de la personne remplacée ou la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu.

 

Après son congé formation, le salarié absent avait posé des congés, si bien que son retour était prévu pour le 2 janvier 2017, au-delà dont, du 15 novembre 2016, date de la fin de la période minimale. L’employeur fermait son établissement durant les congés de fin d'année, du 16 décembre 2016 au 1er janvier 2017. Il avait mis fin au CDD dès le 16 décembre 2016, pour des raisons évidentes d’organisation, mais sans tenir compte du fait que le salarié remplacé n'avait pas repris son poste.
Le salarié ainsi évincé a contesté la rupture de son contrat et a eu gain de cause. L’employeur aurait dû attendre le retour effectif du salarié, prévu au 2 janvier 2017, pour rompre le contrat du salarié remplaçant. 
Le fait que la période minimale ait pris fin plusieurs semaines auparavant est sans effet à cet égard.

 

Source :

(courdecassation.fr) Cour de cassation, chambre sociale, 30 novembre 2022 n° 21-17.849 

 

Validité de la signature manuscrite numérisée pour un contrat de travail

Selon le Code du travail, le contrat de travail à durée déterminée (CDD) est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. A défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée (Article L 1242-12 du Code du travail). 

 

Bon à savoir 💡

La Cour de cassation juge de façon constante que le contrat à durée déterminée qui n’a pas été signé par le salarié ou par l’employeur doit être considéré comme non écrit, si bien que le salarié peut demander sa requalification en contrat à durée indéterminée (CDI), en application de l’article L 1242-12 du Code du travail. 

 

Sur la requalification en CDI d’un CDD :

  • non signé par le salarié, voir Cour de cassation, chambre sociale, 27 mars 2019, n° 17-26.273 ;
  • non signé par l’employeur, voir Cour de cassation, chambre sociale, 14 novembre 2018, n° 16-19.038.

Un salarié peut-il demander la requalification de son CDD en CDI au motif que la signature de l’employeur a été apposée sous la forme d’une image numérisée, ce qui équivaudrait à une absence de signature, et donc à une absence d’écrit ?

 

La Cour de cassation répond négativement à cette question. En effet, en l’espèce, la signature en cause était celle du gérant de la société et permettait parfaitement d'identifier son auteur, lequel était habilité à signer un contrat de travail. En conséquence, l'apposition de la signature manuscrite numérisée du gérant de la société ne valait pas absence de signature. La demande de requalification du CDD en CDI devait donc être rejetée.

 
La Cour de cassation estime, approuvant l’analyse du salarié, qu’une image numérisée de la signature ne peut pas être assimilée à une signature électronique au sens de l'article 1367 du code civil. Mais elle juge que cette image n’est pas nécessairement dénuée de toute valeur juridique, contrairement à ce que prétendait le salarié. 
 
 Source :

(courdecassation.fr) Cour de cassation, chambre sociale,14 décembre 2022, n° 21-19.841

 

Paramètre de nullité d'une convention de forfait en jours

Au fil du temps, la Cour de cassation a été amenée à se pencher sur de nombreux accords collectifs instituant un forfait en jours, pour juger de leur validité, à la demande de salariés soumis à ces forfaits. 

 

Bon à savoir 💡

Rappelons que lorsqu’il signe une convention de forfait jours, le salarié voit sa durée du travail décomptée en nombre de jours dans l’année. Les dispositions relatives à la durée légale hebdomadaire du travail, aux heures supplémentaires et aux durées maximales journalière et hebdomadaire du travail ne sont pas applicables.

 

Dans un arrêt du 30 novembre 2022, la Haute Cour examine l’accord du 5 septembre 2003, attaché à la convention collective nationale des commerces de détail non alimentaires du 9 mai 2012. Elle juge qu’une convention de forfait conclue dans le cadre de cet accord est nulle.


En effet, cet accord n’institue pas de suivi effectif et régulier permettant à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, et n'est pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé. 


L’accord collectif contrevient ainsi à l’obligation de garantir le respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires, et, plus largement, aux principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur.

 

Source :

(courdecassation.fr) Cour de cassation, chambre sociale, 14 décembre 2022, n° 20-20.572

 

Paiement d'heures supplémentaires au forfait annuel

Un salarié, qui a été soumis à tort à un forfait annuel en jours, peut prétendre au paiement d'heures supplémentaires.
En cas de litige, le juge doit vérifier l'existence et le nombre de ces heures, conformément à la législation.

 

Selon l’article L 3171-4 du Code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

 

Le juge, ayant déterminé le nombre d’heures supplémentaires accomplies par le salarié, doit  calculer la rémunération correspondante, que l’employeur devra verser au salarié. 
Il en est ainsi, quel que soit le montant de la rémunération perçue par le salarié. En effet, selon la Cour de cassation, le versement d'un salaire supérieur au minimum conventionnel ne peut tenir lieu de règlement des heures supplémentaires.

 

Dans l’affaire donnant lieu à l’arrêt du 14 décembre 2022,  le salarié avait perçu une rémunération mensuelle de 5 666 euros, supérieure de plus de 3 172 euros à ce qu'il pouvait, le cas échéant revendiquer, en application des dispositions conventionnelles. La Cour d’appel avait jugé que ce salarié avait de ce fait été rempli de ses droits en matière de paiement des heures supplémentaires. A tort selon la Haute Cour.

 
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